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Phénomène des enfants de rue au Togo

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Selon une étude conjointement réalisée en 2011 par le Fonds des Nations Unies pour l’Enfance (UNICEF) et le Bureau International du Travail (BIT), ils sont environ 5000 enfants au Togo à prendre les rues pour domicile. Mais cette étude n’a visiblement pas arrêter le phénomène. Le nombre d’enfants de rue continue d’augmenter inexorablement et si rien n’est fait le Togo est tout proche d’une situation semblable à celle de la République Démocratique du Congo (RDC) où les enfants de rue (appeler ‘‘microbes’’) s’organisent en bandes pour braquer avec une barbarie insoutenable.

La situation de ces enfants devrait préoccupée les autorités togolaises, vu le danger qu’ils courent et représentent pour la société. Mais l’horizon est sombre. Voici l’univers atroce dans lequel vivent les enfants de rue.
Il est 00 heure. Au moment où la majorité des Togolais dorment paisiblement chez eux, dans leurs chambres (climatisées pour certains), au niveau de Byblos (la discothèque), ils sont quatre petits garçons (âge comprise entre 8 et 12 ans) à se coucher sur des cartons posés sur le pavé entouré de sacs de plastique sous la table d’une commerçante. Un peu plus loin, dans une cafétéria qui vient de fermer, trois jeunes garçons ont pris d’assaut la devanture avec des sacs de maïs usés dans les mains.

Source de l'image : Icilome

Credit photo : Icilome

Ils attendent là depuis plusieurs heures. Au niveau de la station d’une société pétrolière de la place en face de la plage, la scène est plus triste. Un enfant couché, face contre mûr, dort malgré la température particulièrement fraiche à ce niveau à cause de la proximité de la mer. La chaussée est à quelques mètres seulement.
La misère, encore la misère et rien que la misère.
Comme ces enfants, ils sont des milliers dans les rues de Lomé à attendre la fermeture des magasins, boutiques, bars ou autres pour prendre d’assaut leur devanture où ils dresseront leurs lits de fortune.
Franck, 9 ans dans la rue depuis plusieurs années –il ne se souvient pas du nombre d’années – raconte : « Quant il fait nuit, je cherche un carton. Puis j’attends que la cafétéria ferme ses portes, pour que je puisse dormir un peu. S’il ne ferme pas vite alors je vais me coucher sous les tables que les commerçantes rangent à coté du Byblos. Si un autre enfant y était avant moi alors je le déloge ».

Firmino, 12 ans, le regard innocent, n’attends pas la fermeture des cafétérias, c’est devant un super marché (au bord du boulevard) qu’il transforme en chambre à coucher.
« La nuit je me couche sur des sacs de maïs usés que j’ai préalablement ramassés dans la journée au grand marché de Lomé ». « Je me promène pendant des heures le long du Boulevard. Si j’ai sommeil alors je me couche dans un coin sur un carton si j’en trouve, dans le cas contraire, je me couche à même sur le sol. J’ai mal mais il y a rien à y faire », susurre pour sa part Kodjovi, 13 ans, les mains sur la tête. Il est dans la rue depuis six (6) mois, mais contrairement à ses jeunes frères, lui n’a pas un espace réservé pour se coucher.
La situation que nous venons de décrire est une réalité sordide que vivent les enfants de rue. Ces enfants à la merci de la nature, pour se coucher attendent des heures et des heures pour que les bars et les boutiques ferment, pour se frayer leurs couchettes.
La journée, on retrouve la grande majorité de ces enfants au grand marché de Lomé. On les retrouve aussi à la plage ou encore sur le long du Boulevard du 13 janvier. Pour survivre, ces enfants n’ont que trois alternatives : mendier, voler ou faire de petits boulots sous-payés.
Franck, 9 ans, actuellement accueilli par l’Ong les Amis pour une nouvelle génération d’enfants (Ange) raconte : « Dans la rue je fais la manche, on me donne 200, 100 ou 50 FCFA. Si je n’ai pas eu de chance dans la journée, la nuit je vole des maïs frais ensemble avec un ami. Ou encore on sillonne les restaurants sur le boulevard pour manger le reste des repas ».
Kodjovi, lui, a trouvé une solution particulière pour survivre. « Je nettoie les voitures qui viennent se garer au bord du boulevard ou devant les restaurants. Je gagne au moins le minimum pour la journée », affirme-t-il.

Venus d’horizons divers, ces enfants arrivent très vite à se familiariser dans la rue entre eux. Mais pourquoi prennent-ils la décision de quitter leurs familles pour la rue ?
Un enchevêtrement de causes.
Les causes de ce phénomène d’une grande ampleur sont variées et diverses. Elles sont imputables à l’enfant, à la famille ou à l’Etat. Même si les causes qui poussent un enfant à vivre dans la rue sont d’origines diverses, elles s’entrecroisent. Entre autres causes, on peut citer: la précarité de la famille, le divorce des parents, la maltraitance ou autres abus, le manque d’affection ou encore la promiscuité, l’enfant lui-même, etc.

Certains enfants de par leur nature sont difficiles à maîtriser. Un tel enfant est réfractaire aux conseils et enclin à la liberté et à la facilité de la rue. « Nous voulions connaître Lomé, parce qu’on entend nos grands frères dire qu’à Lomé il y a beaucoup d’activités et tu seras libre de faire ce que tu veux », explique Adjallo Ayaovi, 18 ans, ancien enfant de rue.

La seconde cause principale qui pousse les enfants à fuguer est l’atmosphère familiale. « J’ai quitté la maison, parce que mon père me frappait dès qu’il revient à la maison bourrer d’alcool et il ne me donne même pas à manger. Si les voisins ne me donnent rien alors je me couche le ventre vide. C’est ce qui ma amené à partir de la maison pour rejoindre ma mère au Bénin», témoigne Remember, 13 ans d’origine ghanéenne recueilli par l’Ong Ange.
Dans ce cas, la situation socio-économique de la famille est joue un rôle prépondérant. La situation économico-sociale se caractérise par la misère familiale et par une désintégration de la situation matrimoniale des parents. Les parents n’ont plus les moyens d’expression de leur affection et de leur responsabilité.
Un enfant qui n’est plus nourri ou que les parents encouragent à une auto-prise en charge précoce se transformera en un mendiant, un enfant de rue. C’est ainsi que certains enfants sont envoyés dans la rue pour mendier et ramener pour certains le butin aux parents.
« Ma mère me disait chaque fois que moi aussi je pouvais ramener quelques choses à la maison », affirme Antoine 12 ans. A force de mendier dans la rue, Antoine a décidé de ne plus rentrer à la maison. Le manque de repère fait que certains parents abandonnent leurs enfants, les laissant devenir enfant de rue.
Mais la part de responsabilité des parents est intrinsèquement liée aux conditions sociales dans lesquelles vivent les populations.

L’État n’a plus d’autorité, puisqu’il a laissé tomber les avantages qu’il accordait aux parents pour bien prendre soin des enfants. Aussi, ne peut-il plus contraindre les parents à remplir leur autorité parentale.
L’État ne remplit sa fonction envers les parents et l’institution famille est laissée à elle-même. Aujourd’hui, le Togo est dépourvue d’une vraie politique sociale. Les autorités togolaises ont toutes les peines du monde à mettre en place une politique tournée vers le sociale.
Si un projet supposé aider les gens des couches défavorisées voit le jour, il est plutôt accaparé par les gens qui n’ont aucunement besoin de ce dernier. Les familles en situation difficiles ne bénéficient d’aucune aide venant de la part de l’Etat.
Ces enfants ne se préoccupent pas des dangers auxquels ils s’exposent dans la rue. En effet, s’ils ne se préoccupent des dangers qui les guettes c’est avant tout parce que leur objectif premier c’est de survivre. Pour survivre, certains tombent dans la délinquance et volent parfois avec agression.
Des conséquences désastreuses.
Livrés à eux-mêmes, ces enfants sont très vulnérables et exposés à toutes sortes de dangers : exploitation économique, esclavage sexuel, maladies etc.
« il y a deux jours, je me su battu avec un ami parce qu’il na pas voulu partager les 100 frs que quelqu’un nous a donnés. C’est pourquoi j’ai ces petites éraflures sur le visage. C’est toujours comme ça», dixit Kodjovi.
Des gens utilisent aussi ces enfants à des fins commerciales sans rémunération conséquente. Et les enfants sont obligés de rendre ses services pour trouver de quoi survivre. « Je lave les assiettes pour une vendeuse de nourriture, elle me donne 200 frs ou 300 frs à la fin de la journée », Firmino, 12 ans.
Sans abris, les enfants oublient presque les notions élémentaires d’hygiènes. Ils peuvent tomber malade du jour au lendemain. La propriété n’est pas la chose la mieux partagée dans la rue. Les enfants se lavent rarement.
« se laver est un luxe. On va souvent à la plage pour le faire », racontait Antoine, 12 ans, lui-même dans un habit qui couvre à peine 2/3 de son corps et très sale. Là encore la mer, un danger permanent vu les victimes qu’elle fait souvent.
Beaucoup d’autres activités et pratiques sont entretenues par ces enfants dans la rue. La consommation des stupéfiants et de la drogue font partie de leur style de vie.
Au-delà de l’avenir incertain et compromis des enfants de rue, ils représentent un danger ambulant. En effet, dans la rue pour survivre, ces enfants se donnent à la délinquance et parfois avec agression. Ce qui met en danger la vie des passants et la sécurité collective dont l’Etat doit être garant. Certains de ces enfants vont jusqu’à forcer la porte de certaines boutiques.
L’Etat peine à résoudre le problème…
Malgré l’arsenal juridique et institutionnel mis en place, le phénomène persiste; pire, elle prend une allure inquiétante. Pour Amouzou Kossi Gabriel, directeur exécutif de l’Ong Ange, qui prend en charge environs 700 enfants tous venant de la rue, « l’Etat ne fait presque rien pour venir en aide aux enfants de rue. Il n’y a aucune assistance financière aux structures qui accueillent les enfants de rue alors que les donateurs de l’extérieur demandent chaque fois à savoir quel est l’apport de l’Etat ».
Une ligne verte est installée depuis 2009 pour recevoir des appels en relation avec des enfants en situation difficile, maltraitance, abandon et les enfants de rue. Mais depuis on a du mal à repérer les résultats de cette ligne téléphonique par rapport à la situation actuelle sur le terrain.
Mieux en 2011, l’Etat togolais a lancé le Centre de référence et de prise en charge des enfants en situation difficile (Cropesdi), un centre de « logement temporaire » où sont gardés et pris en charge les enfants en situation difficile avant leur réinsertion dans leur famille, dans une famille d’accueil ou dans une ONG spécialisée. Les enfants y sont gardés pendant une durée minimale de 72h et au maximum trois mois et bénéficient d’une prise en charge psychologique tout le long de leur séjour.

Au-delà de la simple prise en charge, l’existence d’une Direction générale de la protection de l’enfance (Dgpe), placée sous la tutelle du ministère de l’Action Sociale, la Promotion de la Femme et de l’Alphabétisation, devrait contribuer à appréhender la problématique de la protection des droits des enfants.
En outre, en 2014, le gouvernement togolais par l’entremise du ministère de l’Action Sociale, la Promotion de la Femme et de l’Alphabétisation, a initié un forum sur les enfants de rue. Ce forum devrait formuler un certain nombre de recommandations et de mesures d’accompagnements mais jusqu’à à présent ces recommandations peinent à être mises en œuvre…la suite

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